Les explications de Bernadette Belem Yaméogo, directrice provinciale du ministère de l’Action humanitaire, sur le dispositif de prise en charge des PDI et les difficultés rencontrées pour faire face à cette situation d’urgence.

Comment se présente la situation des PDI dans la province du Houet ?

Nous accueillons des personnes déplacées internes dans toute la province du Houet. Elles sont logées dans toutes les communes, c’est-à-dire les douze communes rurales plus la commune urbaine de Bobo-Dioulasso. Nous avons enregistré à la date de novembre 2021, 15 206 PDI pour la province du Houet. Au niveau de la commune de Bobo-Dioulasso, nous en sommes à 5 166. Sur ces 15 206, nous avons 6 267 hommes, 530 femmes et plus de 9 000 enfants. Parmi les enfants, ceux qui ont moins de cinq ans sont 2 720 et 6 282 ont plus de 5 ans. Au niveau de la commune, sur les 5 166 PDI, nous avons 906 hommes, 1 271 femmes, les enfants de moins de 5 ans sont 900 et ceux de plus de 5 ans, 2 089.

D’où viennent ces personnes déplacées?

Les déplacés que nous enregistrons ici proviennent des régions à haut défi sécuritaire. Je parle du Sahel, notamment la province du Soum, il y en a qui viennent de Toeni ou de Titao dans le Nord, de Djigouè dans la région du Sud-Ouest, de Lota dans la Boucle du Mouhoun. Récemment nous avons enregistré des PDI venues des Cascades notamment de Mangodara.

Comment est organisée leur prise en charge ?

Le ministère a mené des plaidoyers auprès des autorités au niveau local, par exemple les maires, les préfets, les responsables des différentes communautés pour faciliter le signalement des nouvelles personnes déplacées. La première chose à faire au niveau du ministère c’est leur comptage rapide et lancer une prise en charge d’urgence. La prise en charge d’urgence consiste par exemple à apporter des vivres et voir comment les loger avec l’appui des communautés. La particularité au niveau du Houet est que nous n’avons pas de site d’accueil.

Où sont alors logées ces personnes déplacées ?

Ce sont les populations hôtes qui s’organisent pour accueillir les déplacés. Des parents ou bien simplement des habitants qui ont pitié d’eux. Dans la prise en charge d’urgence s’il y a également des questions de santé, on essaie d’y parer. Si l’urgence est levée, on voit avec les partenaires comment permettre à ces personnes de se relever, de se prendre en charge. Il arrive aussi que dans les déplacements, les membres d’une famille se séparent et se perdent de vue, nous les aidons à se retrouver et éventuellement à faire un regroupement selon les liens familiaux. En plus il peut avoir une prise en charge psychosociale.

Face à cette situation humanitaire, avez-vous des partenaires qui vous appuient ?

Nous avons des partenaires tels que le HCR et Plan Burkina. Plan Burkina nous a aidés à donner des abris à certaines PDI parce qu’il arrive que les familles d’accueil soient débordées. Les partenaires organisent également des discussions de groupe pour connaître leurs besoins avant d’agir. Ils offrent des Activités génératrices de revenus (AGR) ou bien de la formation. Le PNUD intervient également comme partenaire, notamment sur des formations pour rappeler les droits des hommes, des femmes, ainsi de suite.

Avez-vous enregistré des cas de retour de personnes déplacées internes dans leurs localités d’origine ?

On ne peut pas pour l’instant parler de retour de ces déplacés internes. Les PDI vont d’une région à l’autre pour pouvoir se sentir mieux. Sinon effectivement on enregistre des départs mais pour aller dans d’autres localités. Ainsi ils atterrissent dans des régions qui leur sont plus profitables. Pour l’instant aucune action n’est organisée pour aider ces déplacés à retourner dans leur région d’origine.

Comment envisagez-vous cette question du retour à court, moyen ou long terme ?

Au niveau de la direction provinciale on envisage une perspective de retour de ces PDI, au niveau des groupes de discussion et causeries que nous organisons, on essaie d’identifier tout ce qui peut les aider à retourner dans leur région d’origine et les y fixer. Mais pour nous, il ne s’agit pas de se précipiter pour entreprendre une telle opération. On a vu des cas où des PDI ont eu les moyens de repartir à la faveur d’une certaine accalmie. Malheureusement ces personnes ont vite déchanté. Nous envisageons ces retours, mais pas avant que les localités soient véritablement sécurisées et qu’elles aient un minimum de paix et de sécurité.

Est-ce que vous enregistrez des demandes d’aide de la part des familles d’accueil ?

Les soutiens apportés aux PDI s’étendent aussi à la famille hôte car ce n’est pas souvent que les PDI partagent spontanément les appuis qu’elles obtiennent avec leur famille d’accueil. Pour éviter tout désagrément en la matière, nous prenons en compte les familles hôtes. Il faut insister sur le fait que des autochtones ont dégagé des terres pour permettre à ces PDI de pouvoir cultiver en attendant de repartir. Il est vrai qu’il y a des appuis mais ces appuis ne peuvent pas répondre à toutes les sollicitations.

De quel budget dispose la direction provinciale de l’Action humanitaire pour faire face à la situation ?

[Rires…] Nous ne disposons pas de budget au niveau de la direction provinciale. Le système est fait de sorte que le Conseil national de secours d’urgence (CONASUR) puisse intervenir ici efficacement au nom du ministère en charge de l’Action humanitaire. Les partenaires ne mettent pas non plus de budget à la disposition de la direction. Ils interviennent directement avec leurs moyens auprès des PDI.

— Fousséni Kindo/Boukari Ouoba